Récit d’un marathon

L’histoire commence bien souvent des mois avant l’événement, mais disons qu’ici je me contenterai de reculer à la veille. Je sais que je dois me coucher à 20h car je dois me lever à 3h pour m’offrir un départ à 5h, ce qui ne m’aura pas laissé suffisamment de temps pour bien digérer, mais tout de même, ça devra faire l’affaire, je ne vais pas ingurgiter mon repas à 1h, pour avoir terminé à 2h, soit 3h avant le début de ma course.

Aux environ de 4h, je revois mon parcours habituel pour mes sorties longues, sauf que j’y ajoute un petit tronçon pour être bien certain d’avoir fait suffisamment de kilométrage, une fois de retour dans mon quartier, pour ne pas avoir à trop tourner en rond.

Alors voilà, nous y sommes, il est finalement 5h03 quand je démarre ma montre. C’est la nuit, y a pas un chat, du moins ceux que je peux apercevoir sont très furtifs, et dès le premier Km, petit cliché d’une 148 totalement déserte, déjà je sens que la course sera bonne, je la sens bien comme on dit.

Y avait pas grand monde s’a street à matin !

Je me permets de courir plusieurs Km directement sur le boulevard, je n’aime pas ça les trottoirs et leurs craques, et leurs montées, et leurs descentes.

Le deuxième tronçon se trouve à être la piste cyclable vers l’ancienne gare de Deux Montagnes, alors deuxième cliché pour bien capturer les zones d’ombre qui s’annoncent devant.

Malgré la nuit, j’aime encore la couleur des arbres.

Puis rendu au petit segment en forêt… où j’ai déjà vu traîner une petite hache, petite pause ici. Sous les feuilles, la piste cyclable.

Quand on dit tapis de feuilles.

Je poursuis mon petit bonhomme de chemin jusqu’à traverser la rivière pour me rendre dans les beaux quartiers de Laval, tout se passe pour le mieux, je profite de toute cette tranquillité, je me sens si bien !

Et puis arrive le Km 15 ! Douleur au mollet… droit ! Je m’attendais à cette douleur, mais pas de ce côté, car disons que c’est habituellement celui de gauche qui se plaint, mais pas cette fois-ci. Et calvass, certainement pas après seulement 15 petits Km ! Alors j’applique ma petite recette perso, j’alterne entre l’amorti sur talon, et celui sur la plante du pied… ça fait la job comme on dit. Mais je me demande bien comment vont se passer les 27 prochains Km… Je suis inquiet.

Je poursuis ma course jusqu’à me rendre compte que j’ai manqué une intersection, alors arrêt Google Maps oblige, mais comme je me fais vieux, difficile de lire le nom des rues sur mon téléphone. Enfin, y avait pas trop de dommage, me suis arrêté exactement à une rue me permettant de remonter et débuter mon retour à la maison.

C’est probablement le plus long tronçon de toute ma course, la rue principale, mais le soleil se lève et ça fait du bien, je peux déjà me dire que j’ai plus de la moitié de complétée, et la forme, en général, est très bonne je dirais.

On croirait presque voir le soleil à travers les nuages.

Pause #2 lorsque je longe la rivière pour me rendre vers le pont, mais là le redémarrage de la machine a été un peu plus ardu, je viens de passer le Km 25, et je sens que ça grince un peu plus, mais ce n’est absolument rien si je compare au mois d’avril où je n’avais déjà plus de jambes dans les côtes de St-Joseph.

Le lever du soleil est magnifique sur la rivière, et j’en profite pour le croquer sur le vif à la suite de mon passage sous le pont, et c’est durant ce Km que mes écouteurs vont me lâcher et m’obliger à m’écouter courir, respirer, penser.

Je ne pourrai jamais rester de glace face à un si beau paysage… Merci la Vie !

Je rentre dans le cimetière, mais pas vraiment l’intention de m’y éterniser. J’aurais aimé croiser Phil une fois de plus, mais non, il ne s’est pas pointé ce matin, c’est une vraie de vraie course en solo.

Je sens un petit brouillard dans mes souvenirs rendu là, j’approche le Km 30, alors assurément je commence à me ravitailler aux 5 Km plutôt qu’aux 10.

C’est à partir du Km 33 que je commence à me dire qu’il me reste moins de 10 Km, et je jette des regards rapides un peu plus fréquemment à ma montre, car je n’entends plus le coach, sur mon téléphone, m’indiquer que j’ai complété un Km supplémentaire.

Je suis donc à longer les rues habituelles de mon quartier, et c’est finalement durant le Km 35 que j’ai une forte crampe au derrière de la cuisse droite, alors pas question de passer un dernier ravitaillement (j’ai comme un début de nausée qui s’installe), je marche quelques mètres, et la reprise n’est pas tellement évidente, mais je suis encore très confiant de pouvoir y arriver.

À ce stade-ci, je ne peux plus me permettre de trop lever les genoux, sinon ça crampe en-arrière, alors je dois carrément être prudent avec les dos d’âne (y en quelques-uns dans mon quartier on va dire), d’autant plus que jusque chez moi, c’est nettement plus souvent du dénivelé positif que l’inverse. J’ai davantage l’impression de trottiner que de courir, mais au moins je ne marche pas !

Je sais pertinemment que ça va le faire, j’ai encore tellement d’énergie à l’intérieur, au niveau du ventre là, les trippes devrais-je dire, mais les jambes ne supportent plus aucune accélération, aussi petites soient-elles, alors je commence à regarder les Km qui s’égrainent, et à me dire que je n’ai qu’à conserver cette allure confortable, et j’arriverai à le compléter en-deçà de 4h, ce qui m’encourage un peu.

C’est donc avec une allure très légère que je bouffe les derniers Km jusqu’à 41,2, où là je dois arrêter net, ma jambe droite refuse de plier, et je dois me pencher vers l’avant pour étirer le muscle arrière. Petit essai timide, ça marche, puis ça court de nouveau, j’y vais à petites enjambées, je suis à quelques pâtés de chez moi, alors j’entreprends un dernier détour, question d’arriver à compléter le dernier Km.

J’arrive tout près de chez moi, ma blonde et ma fille sont là dans la rue, j’ai la vue embrouillée, mais je devine bien que ce sont elles quand je les vois m’encourager, et que ma fille vient me rejoindre pour faire les derniers 100m avec moi. Je suis tout simplement aux anges, alors un dernier coup d’œil à ma montre, je tourne le coin, je veux être bien certain d’avoir la distance correctement enregistrée dans Strava, sinon nous savons tous que ça ne comptera pas vraiment 😁

Récit d’un marathon

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